Je m’étais poussée dans le petit matin gris sans vraiment réfléchir mais mon inconscient avait sûrement pressenti ce qui m’attendait.
Gantée, à demi planquée sous mon bonnet et mon écharpe, faisant rouler mon bagage, je serpentais entre les branches arrachées de leur source nourricière durant une nuit tourmentée où pluie et vent s’étaient mêlées.
Chemin faisant, je fus sortie de ma rêverie par une dame carte vermeil désirant me conter l’incompétence des agents de la ville, incapables de couper les branches avant que celles-ci ne tombent! J’avais pris du temps au temps et ce manque d’empressement de ma part avait dû induire chez elle une possibilité d’échanges courtois. Que nenni!…. Cette vieille empoisonneuse me laissa pantoise. Le genre de situation où vous ne savait même plus si vous avez pu au moins articuler une phrase correcte!
Je repris ma route tout en me demandant comment cette harpie avait osée pénétrer dans cette limite que l’on appelle « intimité ». Ben oui, je suis un peu sauvage, je n’aime pas que l’on me dérange quand je suis dans une sérénité parfaite avec mon moi intérieur. Pas misanthrope, mais pas loin!
Arrivée à destination, une autre surprise m’attendait! Quand ça veut pas, ça veut pas!!!!
Des arbres énervés avaient décidé de barrer la voix au RER qui devait me conduire jusqu’à Paris.
Je pus lire dans un encadré jaune du plus bel effet …. Grosso modo, c’était niqué pour aller sur Paris en RER.
En admiration déconcertée devant cet écran hypnotique, j’entendis une voix me dire « Il ne nous reste plus qu’à partager un taxi! ». Je tourne la tête et me retrouve face à un clone souriant du Père Noël sans son accoutrement rouge!
Dans cet attroupement de bipèdes rouspéteurs, il m’avait choisi « moi », pour devenir « nous »!!!! J’ai la tête du pigeon aujourd’hui où l’univers m’avait donné une mission précise? N’ayant pas le temps de chercher réponses à ces questions et à d’autres telles que « Qui de l’oeuf ou de la poule…. », je cherche à évincer le gêneur qui par un argument pécunier aura raison de ma réticence. Il avait su me parler le bougre!!!!!
Et nous voilà partis dans le hall de la gare à chercher sur mon mobile le téléphone de la compagnie de taxi.
Afin de meubler l’attente du traîneau à moteur, le juge à la retraite de 67 ans m’apprend qu’il est sociétaire du Crédit Mutuel, qu’il habite rue de la Libération, qu’il part déjeuner à St Michel avec un ami dont la femme est couchée au lit avec la grippe et qu’il part à 15 heures pour Palerme! Quel pédigree!!! Dans toutes ces informations, un choc: Palerme! Et une image me revient lors de vacances en Sicile: les voitures noires barrant les deux petites ruelles menant à l’Eglise ou se déroulait un mariage. Mafia et amour, détonant!
J’abandonnai mon mafioso à la gare d’Austerlitz où un Intercité devait me mener loin de la capitale.
Mais quand je vous dis que l’univers est facétieux!!! Moi qui court après le temps sans jamais le rattraper la seule fois où j’arrive bien plus qu’en avance, trop fière…. La SNCF décidera de prendre tout son temps …. Bouge ta loco Paulo!!!! 45 minutes de retard, c’est possible!!!!