Il y a urgence

Quand une douleur s’immisce, s’installe et vous trouve accueillante. Quand la nuit elle décide de faire la fiesta dans votre corps, on se rhabille en râlant (faut bien ça!)on se dit que là-bas, on prendra son mal en patience. Nous voilà donc aux urgences où l’on s’attend à voir surgir Docteur Mamour!
Vous comptez une vingtaine de personnes et vous vous rendez compte que vous auriez dû prendre votre bouquin…. La nuit sera longue!
A bien y regarder, ils ont pas l’air d’être très mal en point. Seulement la sale tête de celui qui aimerait être dans son lit ou qui se dit qu’il est en train de louper la énième rediffusion d’un épisode de sa série préférée et il se dit que de toute façon à cette heure là c’est fini! Quelle soirée!!!!
Au fur et à mesure de les inscrits sont appelés, vous vous rendez compte que certains sont carrément accompagnés par une équipe de volley! Il y a le mari qui attendait semi-patiemment sa femme et lorsqu’elle arrive en fauteuil roulant une jambe plâtrée, il ne compatit pas mais s’énerve en demandant si le plâtre était obligatoire. Si il a une scie, pas certaine que le plâtre résistera jusqu’à demain! Alors que son visage se décompose, il voit très clairement que sa femme ne remplira pas son cahier des charges pour les prochaines semaines:courses, ménages, les enfants…
Et puis tout vient à point à qui sait attendre!
Vous voilà accueillie dans une salle tiède à la lumière peu flatteuse où après avoir expliqué à l’infirmier, tout de vert vêtu, ce qui vous préoccupe, il vous apporte un petit flacon « pour faire pipi dedans » comme il lui semble indispensable de préciser. Enfermée dans ce lieu exigu que nous nommerons « toilettes », tout se passe à huit clos entre vous et cette petite fiole qui contiendra le précieux liquide… Revenue dans cette salle tiède, vous confiez au coton tige votre récolte tout en le suivant du regard. Et en une fraction de seconde, c’est le drame! Le géant vert s’immobilise et pose sur une chariotte le contenant au contenu encore tiède. Sa médaille de naissance a tenté de se faire la belle mais il a senti le métal glissé contre sa peau. En urgence extrême, une infirmière dévouée se précipite pour aider le pauvre malheureux à remettre sa maudite ferraille. Après des remerciements dont je tairais la mièvrerie, il se retourne vers la chariotte et se rend compte, au malheur, qu’il y a deux flacons!!! Etant mal latéralisée, la patiente s’abstient de tout commentaire et se dit qu’avec un peu de chance dans quelques minutes elle aura un soucis à la prostate, elle sera peut-être enceinte ou présentera une infection urinaire… Notre chaperon vert vient casser le suspense insoutenable en demandant à sa fidèle admiratrice et joaillière préférée si elle avait, elle aussi, posé, en ce même endroit, un petit flacon. Que nenni lui répondit la gourgandine! La mine déconfite il se retourne vers la patiente et s’aperçoit à ce moment-là qu’elle l’observe. Il est mal le flageolet! Le laisser dans son embarras où l’aider à s’en débarrasser? Elle récupère sa latéralité et décide d’orienter sa main ganté. Et voilà notre Mister T et sa médaille partis au labo. Les minutes s’égrainent et apparaît devant elle un individu couleur aubergine qui après déduction (les présentations sont de trop) doit être le médecin de garde. Le verdict tombe. Comble de malchance le stock de l’hôpital ne contient pas le fameux remède, il faudra donc se rabattre sur du paracétamol jusqu’à ce que la fatigue la terrasse ou (moment d’espoir…) voir avec l’agent d’accueil quelle serait la pharmacie de garde la plus proche. Arrivée à l’accueil qui n’a que la pancarte d’accueillante, elle paie docilement au cuir chevelu tout en lui demandant s’il pourrait lui indiquer la pharmacie de garde.La réponse négative du cuir chevelu anéanti son espoir de dormir sereine.Elle a toutefois envie de choper et secouer énergiquement la tignasse de cet énergumène qui ne prend même pas la peine de lever la tête quand on lui parle mais sa bonne éducation l’emporte. Elle rentre donc chez elle résignée et éreintée. C’est cette même fatigue qui l’emporte vers le sommeil.